Mises en accusation pendant la crise financières, notamment à cause des subprimes et autres emprunts toxiques qu'elles avaient notés triple A et qui  ne valaient plus rien quelques mois après, les agences de notation affichent aujourd'hui une santé insolente. Elles continuent à être incontournables pour la notation des dettes des entreprises et des États. Et avec les torrents de liquidités déversés par les banques centrales, les émissions de dettes atteignent des niveaux records.

Les agences de notation

Mises en accusation pendant la crise financières, notamment à cause des subprimes et autres emprunts toxiques qu'elles avaient notés triple A et qui ne valaient plus rien quelques mois après, les agences de notation affichent aujourd'hui une santé insolente. Elles continuent à être incontournables pour la notation des dettes des entreprises et des États. Et avec les torrents de liquidités déversés par les banques centrales, les émissions de dettes atteignent des niveaux records.


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Un marché dominé par les mêmes acteurs depuis 100 ans Les premiers ratings firent leur apparition après la crise de 1907 pendant laquelle de nombreuses entreprises ont fait faillite. C’est l’agence John Moody’s and Company qui mit en place le premier système de notation financière, afin d’apprécier la solvabilité des titres de chemin de fer. Pendant quelques années l’agence de Moody surfe seule sur la vague des notations. Mais elle est rejointe en 1916, par l’agence Poor’s Publishing. Deux autres concurrents font leur entrée sur le marché en 1922 et 1924, il s’agit respectivement de Standard Statistics et Fitch. Depuis près de 100 ans, ces 4 agences, trois depuis 1941 après la fusion de Poor’s et Standard’s Statistics, dominent le marché. Pendant plus d’un demi-siècle, les agences se rémunéraient grâce à la vente de leurs publications et dans une moindre mesure la vente de services (renseignements sur les entreprises notées, conseil d’achat et de vente de titres…). Mais la crise des années 1930 entraîne une diminution des ventes de publication. A partir de 1940, les manuels qui sont vendus sont surtout consacrés aux collectivités et entreprises locales américaines. Le début des années 1970 constitue un tournant majeur dans le mode de rémunération des agences. En effet, de plus en plus d’investisseurs réussissent à se procurer les manuels des agences sans les avoir préalablement achetés (notamment avec l’essor de la photocopieuse). Parallèlement, suite au défaut de paiement de la compagnie de chemins de fer Penn Central en 1970, un nombre croissant d’émetteurs ont sollicité directement les agences afin d’obtenir un rating, visant en fait à rassurer le marché. A partir de là, les agences vont facturer leur prestation aux émetteurs Aujourd’hui les agences évaluent deux entités : d’une part les entités publiques comprenant les Etats et collectivités locales et d’autres parts les entités privées avec les entreprises, les établissements de crédit et les produits structurés. Le marché des produits dérivés s’est développé de manière tellement conséquente que la notation de ces produits représentaient près de 50% de l’activité des agences en 2007. Les différents concepts intervenant dans la notation Les premiers ratings des années 1910 évaluaient la liquidité et la sécurité des obligations. Au fil des années de l’entre-deux-guerres, la référence à la liquidité des titres s’est progressivement estompée et la notion de solvabilité s’est imposée. La solvabilité correspond à une probabilité de défaut de paiement. Depuis le milieu des années 2000, les agences prennent de plus en plus en compte le risque de recouvrement. Il s’agit de l’anticipation de la perte financière subie par les investisseurs en cas de défaut. Ainsi aujourd’hui les agences attribuent trois types de notes à une même entité : la note d’émetteur qui évalue la qualité globale d’un émetteur de dette, la note d’émission qui est spécifique à chaque obligation et la note de recouvrement qui renvoie à l’anticipation de la perte financière subie lors d’un défaut de paiement. Les notes suivent une échelle de notation. Elles sont regroupées en deux catégories : investment grade et speculative grade. Les échelles de notation de Fitch et Standrds&Poor comprennent toutes deux 23 notes qui ont la même signification. Dans la catégorie investment grade, on retrouve les notes qui s’étalent entre AAA et BBB-, selon l’échelle suivante : AAA/AA+/AA/AA-/A+/A/A-/BBB+/BBB/BBB-. Les notes inférieures se situent dans la catégorie speculative, ce sont : BB+/BB/BB-/B+/B/B-. Ces deux agences ont également dans leur échelle une catégorie supplémentaire : le défaut de paiement. Elle comprend les deux dernières notes : RD/D pour Fitch et SD/D pour S&P. Moody’s a une échelle de notation de 21 notes. La catégorie investment grade comprend les notes Aaa/Aa1/Aa2/Aa3/A1/A2/A3/Baa1/Baa2/Baa3. Les autres notes appartiennent à la catégorie speculative grade, Ba1/Ba2/Ba3/B1/B2/B3/Caa1/Caa2/Caa3/Ca et C. La note C représente les titres en défaut de paiement. En plus de la notation les agences évaluent des points supplémentaires permettant une meilleure connaissance des titres et émetteurs. La perspective de notation permet de donner une estimation de l’évolution des ratings sur deux ans. Elle peut être positive ou négative. Mais l’agence n’est pas obligée de donner une perspective quand il n’y a pas d’évolution envisagée. La mise sous surveillance sert à signaler la forte probabilité de changement de note (positivement ou négativement) à court terme. Contrairement aux perspectives de notation, les mises sous surveillance sont temporaires. Elles durent généralement moins de quatre mois. Une efficacité et un pouvoir en question Globalement, depuis les années 1980, la qualité des notations de Fitch, Moody’s et S&P s’est révélée satisfaisante. En effet, quand on regarde les entreprises qui se sont retrouvées en défaut de paiement ces dernières années, on s’aperçoit que la grande majorité figurait dans le bas de tableau des notes des agences, plusieurs mois voire années avant la survenance du défaut. Mais les agences de notation ont surtout été raillées sur leurs ratings des produits structurées, notamment lors de la crise des subprimes. En effet, les agences ont du mal à comprendre certains produits tant ils sont complexes, et elles ont des difficultés à établir des diagnostics corrects. Le différentiel de note d’une agence à l’autre est encore plus important que pour la notation d’entreprise ou d’Etat. Les émetteurs de ces produits peuvent ainsi pu pratiquer un véritable «rating shopping », c'est-à-dire choisir de faire noter leurs produits structurés par l’agence qui s’engageait à attribuer la note la plus élevée. Suite à ces échecs, des interrogations les conflits d’intérêt et la compétition entre agences sont apparues. En effet, le fait que l’entité notée soit le client final des agences, qui en plus se trouvent dans un marché oligopolistique à forte concurrence, entrainerait les agences à donner aux émetteurs la meilleure note possible afin d’attirer et de fidéliser les clients. Une agence de notation en situation de monopole serait dans ce cas plus efficace pour les investisseurs qu’une situation de duopole ou oligopole. Ce problème de fiabilité des notes est d’autant plus grave que les agences de notation ont un fort pouvoir sur la psychologie des investisseurs. Ce pouvoir leur a été confié par les émetteurs, mais également par les régulateurs. En effet, depuis les années 30, les autorités de régulations financières ont stipulé que la valorisation des titres dépendait du rating, et ont développé des réglementations dans lesquelles le rating est obligatoire et nécessaire à la prise de décision. Enfin, les agences de notation ont été vigoureusement critiquées pour leur tendance à surréagir une fois les crises confirmées. Leur abaissements de notation, décidés au milieu de chaque récession économique, ont contribué à aggraver les crises. Pendant les mois qui ont suivi la faillite de Lehman Brothers en 2007, les trois agences ont eu recours à plus de 22 000 downgrades et aucun upgrade pour des produits structurés…
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